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Marie-Paule Desaulniers est
philosophe de l’éducation et pédagogue.
Elle a formé les futurs enseignants en
philosophie de l’éducation, éducation
sexuelle et en éthique professionnelle à
l’Université du Québec à Trois-Rivières
(Canada)
pendant de nombreuses années.
Parallèlement à sa carrière
universitaire, elle s’est adonnée au
chant choral et au tango qu’elle
pratique toujours avec bonheur.
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MARIE-PAULE
DESAULNIERS
Éthique,
rencontre et sexualité; et si le tango, tout
comme l’éducation sexuelle, nous permettait de
comprendre ces réalités?
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Université du Québec à Trois-Rivières.
Séminaire de recherche « indisciplinaire » Danse
et espace intime.
Vendredi
le 17 juin 2011 |
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À
Michèle Occelli, une amie inspirante,
médecin formateur en éducation sexuelle
et danseuse de tango
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Le titre
de ce texte est probablement déconcertant; il le
sera un peu moins quand il aura été précisé que
comprendre, dans cette phrase, signifie autant
saisir, percevoir, ressentir que
comprendre rationnellement.
Le tango est une expérience qui peut,
comme toute autre expérience, permettre de
réfléchir et de saisir sa vie, comme l’on saisit
un partenaire dans ses bras, comme l’on saisit
sa vie à bras le corps.
C’est
une approche personnelle
et très libre du thème qui est proposée, fondée
sur une triple expérience; d’abord celle de
formation des éducateurs en éducation sexuelle
qui a duré presque trois décennies, puis celle
de formation
des éducateurs et des professionnels en éthique
professionnelle qui dure depuis dix ans et
finalement celle de la pratique du tango
commencée
il y a quelques années.
Pour
comprendre ce qui suit, quelques précisions
s’imposent concernant le tango et l’éducation
sexuelle. Le tango en question est le tango de
salon, différent du tango des spectacles et des
démonstrations de professionnels, tant par
l’ampleur des mouvements et la virtuosité
technique que par la signification de
l’activité. Il s’agit d’une danse sociale et
d’une danse de couple hétérosexuel ou
homosexuel, une danse vécue et non pas seulement
une danse regardée.
L’éducation
sexuelle qui sera abordée consiste en une
démarche explicite, organisée et collective qui
permet dans un environnement éducatif d’avoir
accès à de l’information sexologique et de
réfléchir ensemble à la sexualité (1).
Repasser
par les trois étapes professionnelles et
personnelles qui viennent d’être mentionnées a
été l’occasion d’effectuer une synthèse sur le
fait d’apprendre à propos de la sexualité, de la
rencontre et de l’éthique.
Il s’agit de réfléchir à la façon dont on
mène sa vie comme on mène le bal, avec des
valeurs qui protègent les personnes c’est-à-dire
avec une éthique. Cette réflexion sera présentée
en usant des pas de tango, en dansant.
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1-
Une
éthique de la rencontre plutôt qu’une morale
Pour
commencer, faisons quelques pas de côté
par rapport à la morale.
La
sexualité peut malheureusement être est le lieu
de nombreux comportements dénués de toute
morale; la violence qui peut aller jusqu’au
meurtre, le viol, l’exploitation, le
harcèlement, l’abus de confiance et la
diffamation.
Ce n’est pas un hasard si la vie sexuelle
fut le lieu de prédilection de la morale
catholique, avec une
sévérité
toute particulière
pendant le XIXème siècle ultramontain du Québec.
L’éducation sexuelle reposait sur une conception
négative de la sexualité comme danger, faute et
punition divine. Elle
était essentiellement négative et
comprenait
des obligations morales, des limites et des
interdits. Parmi ces derniers se trouvait
celui de danser. Finalement, la vie sexuelle
pouvait se conjuguer sous deux modes fortement
réglementés; les devoirs conjugaux ou la
chasteté ecclésiastique. La sexualité n’est
pourtant pas le lieu exclusif ou emblématique de
la vie morale. Cette dernière
concerne
toutes les composantes de la vie personnelle et
sociale ; les relations humaines, le travail, la
santé, l’argent, les loisirs, la politique etc.
Cette surmoralisation de la sexualité a amené la
révolte que l’on sait avec pour conséquence
qu’il est assez difficile de lier actuellement
la vie sexuelle et les valeurs et de proposer
une éthique de la vie sexuelle. Cela n’empêchera
nullement d’essayer, en proposant non pas une
morale fondée sur la peur de la sexualité et un
catalogue de comportements permis et défendus
mais sur les valeurs
qui se situent en amont de la morale et
la fondent comme l’explique le philosophe Paul
Ricoeur (2). La vie sexuelle exige une éthique
mais pas nécessairement une morale répressive
par rapport à laquelle est propose un
pas de côté, quasiment un grand écart.
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2-
Apprendre à être un homme, apprendre à être une
femme.
2.1 Le
but de l’éducation sexuelle
Apprendre à être un homme, apprendre à être une
femme, tel est l’objectif global de l’éducation
sexuelle. Elle permet à chaque personne de
prendre conscience de sa dimension sexuée et de
l’intégrer à sa vie,
dans un projet de vie qui lui ressemble.
C`est une démarche continue, qui dure tant que
dure la vie; il s’agit de faire des pas en
avant.
L’éducation sexuelle
permet pendant l’enfance de prendre
conscience de son identité sexuelle masculine ou
féminine, de son corps avec ses caractères
sexuels secondaires qui apparaissent à la
puberté; pilosité, mue de la voix, seins,
hanches, développement des organes sexuels
internes et externes, silhouette masculine ou
féminine. Elle permet de s’approprier son corps
et parfois d’en être fier. Elle favorise
l’acceptation de la sexualité comme dimension de
toute vie humaine, quelle que soit le mode de
vie et le type de comportement sexuel;
célibataire, en couple, en famille, en
communauté. Elle permet de comprendre aussi bien
la composante naturelle ou biologique de la
sexualité que sa composante culturelle ou
sociale. La sexualité n’est ni bonne, ni
mauvaise intrinsèquement; elle dépend de la
perception que l’on en a, qui entraine des
façons de vivre différentes. Quand la sexualité
est perçue comme une force éruptive, elle est
ressentie comme telle et entraine des
comportements violents; quand elle est perçue
comme un lien social, elle est ressentie comme
attraction sexuelle et mène à des contacts
sexuels et à des relations interpersonnelles. En
dernier lieu, l’éducation sexuelle permet de
comprendre que la vie sexuelle implique autrui
autant que soi-même. La sexualité est une force
qui unit ne serait ce qu’au niveau des cellules
reproductrices; la relation sexuelle est une
rencontre interpersonnelle où la relation à
l’autre peut n’être que fantasmée comme dans la
masturbation ou
virtuelle comme dans l’espace
informatique. Ce qui nous amène aux portes de
l’éthique c’est-à-dire des valeurs nécessaires
pour vivre avec autrui. Les valeurs, comme les
normes qui en sont issues sont indissociables de
la vie sexuelle.
On a pu confondre un temps la libération
sexuelle avec une liberté totale mais ce temps
n’a pas duré; en fait, il n’a jamais existé dans
aucune société. Il est notable que la révolution
sexuelle a amené, au contraire, de nouvelles
normes de performance sexuelle qui posent des
problèmes éthiques nouveaux (3).
L’éducation sexuelle quand elle ne se
limite pas à des techniques érotiques ou
contraceptives,
incite au respect de soi et d’autrui et à
la responsabilité de ses comportements sexuels
(4).
Quelle
relation peut-on alors établir entre l’éducation
sexuelle telle qu’elle vient d’être sommairement
présentée et le tango? Pour établir cette
relation, passons par l’apprentissage et
posons-nous la question suivante; qu’est-ce
qu’on intègre en dansant le tango?
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2.2 Le
tango comme mode d’intégration de la dimension
sexuelle
Le
premier apprentissage du tango est une prise de
conscience du corps, le sien et celui d’autrui,
voire de son corps grâce au contact avec celui
d’autrui. La conscience du mouvement, du
déplacement dans l’espace, du rythme interne de
la respiration, du rythme externe de la musique,
les sensations visuelles, olfactives, tactiles
provoquées par le corps d’autrui, le contact
physique et les sensations de souplesse, de
raideur, de chaleur ou d’abandon qu’il procure
font vivre le corps à un niveau d’intensité
inusité. Apprendre à danser est aussi apprendre
à habiter son corps.
Le
second apprentissage est une relative maîtrise
de l’image corporelle. Après quelques années de
tango survient fréquemment un changement dans
l’attitude corporelle, un dévoilement progressif
du corps, une mise en valeur nouvelle (5). Ce
corps qui danse se précise à soi-même et aux
autres.
Dans cet
élan, le corps est progressivement affirmé et
l’image de soi sexuée est valorisée. Ce n’est
pas seulement le plaisir de la danse qui est en
jeu, mais celui de devenir soi,
de mieux
en mieux.
De façon
plus immédiate et plus agréable que dans
d`autres apprentissages, l’estime de soi comme
danseur ou danseuse
grandit et participe à l’estime de soi
comme homme ou comme femme.
Ce
développement s’effectue avec des partenaires de
danse et sous le regard d’autrui pendant les
cours et les practica*; c’est donc aussi un
développement social comme nous le verrons dans
la suite de ce texte.
Dans
l’éducation sexuelle comme dans le tango, il
s’agit toujours d’apprendre à être un homme, une
femme et de se développer comme tels.
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3-
Apprendre à gérer le désir
Apprendre à gérer le désir, le sien et celui
d’autrui fait autant partie de l’éducation
sexuelle que de l’apprentissage du tango.
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3.1 La
place du désir dans l’éducation sexuelle
Une
fois reconnue la double fonction reproductrice
et érotique de la sexualité, il s’agit
d’apprendre à les vivre, c’est-à-dire d’intégrer
la sexualité dans sa vie personnelle et sociale.
L’énergie de la fonction érotique doit être
comprise et gérée.
L’éducation
à la sexualité qui fut obligatoire dans l’école
québécoise des années 80 à l’année 2000 parlait
assez justement de « comportement
d’approche et d’invite » pour
décrire
les expressions socialement acceptables du désir
comme la
drague ou le flirt (6) qui permettent aux
jeunes d’approcher l’autre.
Il faudrait ajouter maintenant une
réflexion sur l’hypersexualisation des jeunes
(7) qui les amène à adopter des attitudes sexy
et des comportements érotiques imités des
adultes vedettes du show business et de
l’industrie pornographique. Certes, ce sont des
comportements d’apprentissage de la capacité
d’attraction mais ils véhiculent des messages
dont
les jeunes ne sont pas en mesure de contrôler
les effets, ni même parfois de comprendre la
signification. Les jeunes
en sont
les premières victimes.
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3.2 Le
tango comme expression du désir
Quant au
tango, c’est en apprenant à faire des pas en
avant dans la reconnaissance et
l’affirmation de leur identité sexuelle que les
danseurs vont vers leurs partenaires ou les
laissent venir vers eux. Ils finissent par
danser l’un contre l’autre et le désir de ce
contact souhaité le plus harmonieux ou le plus
passionné possible fait partie du succès
remporté par le tango.
Plus que toute autre danse sociale, le
tango porte le désir, il l’illustre et le met en
scène.
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3.3 Le
caractère érotique et sensuel du tango
Le tango
est une danse à caractère érotique tout en
n’étant pas une danse érotique dont le seul but
serait de stimuler sexuellement des spectateurs
masculins tout en leur faisant consommer de
l’alcool.
Il n’a rien à voir avec les danses
érotiques de contact ou de poteaux et les
danseuses du même nom
que l’on
retrouve dans les clubs. Pourtant, son caractère
érotique évident fascine, provoquant chez les
spectateurs parfois l’envie, parfois la gêne,
parfois un mélange des deux.
Ce n’est pas sans raison que cette danse
a été perçue à la fois comme irrecevable dans la
bonne société argentine mais comme emballante et
émoustillante dans les salons parisiens des
années 30, la tolérance par rapport à
l’expression érotique n’étant pas la même dans
les deux sociétés. Ce n’est pas un hasard non
plus si cette danse a le succès actuel que l’on
connait dans des sociétés occidentales où
l’expression publique de la sexualité et du
désir ne posent plus problème.
Le regard le plus néophyte ne peut que
remarquer dans le tango l’enlacement plus ou
moins étroit des partenaires (l’abrazo*), les
torses plaqués l’un contre l’autre,
les mouvements nettement érotiques de la
jambe de la danseuse enroulant la cuisse
de son partenaire ou se lançant entre les jambes
de ce dernier (gancho*). Parfois, c’est la jambe
de l’homme qui s’avance fermement entre celles
de sa partenaire, provoquant à dessein un
mouvement vif de la femme qui relève sa jambe
autour des hanches du danseur; il est difficile
de trouver plus explicite comme mouvement
érotique. À ces mouvements ajoutons la mobilité
des hanches féminines dans les pivots en huit
(ochos*), la cambrure féminine parfois exagérée,
les vêtements ajustés, les bas résille et les
talons aiguilles qui participent d’une
esthétique de prostituée et l’affaire est
conclue. Le tango met en valeur de façon
érotique le couple et tout particulièrement la
femme, pour son partenaire, pour les spectateurs
et accessoirement pourrait-on dire, pour elle.
Tout en
appréciant la danse, il est possible de ne pas
être totalement en accord avec cette mise en
scène particulière, ni avec ce qu’elle
transporte comme conception dépassée et négative
de la femme comme
allumeuse, fatale et vénale.
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3.4 Le
tango comme métaphore
amoureuse
Le tango
est une métaphore de l’union sexuelle et de la
passion amoureuse qu’il présente dans une mise
en scène esthétisée. C’est une forme d’art qui
évoque sans la présenter réellement la
rencontre, la fusion, la passion. À la
différence de la pornographie qui expose des
comportements sexuels réels en se focalisant sur
les organes sexuels et sur l’orgasme, le tango
est une évocation érotique puissante, certes,
mais seulement une évocation.
Il n’existe aucun risque immédiat de
nature sexuelle dans le tango. Danser n’est pas
faire l’amour, même si chacun reconnait que l’un
peut éventuellement mener à l’autre, mais plus
tard, dans un autre lieu que la salle de danse.
Le tango est une danse érotique et sensuelle
portée par une musique et des poèmes qui
exaltent la passion amoureuse,
le plus souvent contrariée.
La
douleur, la tristesse, le désespoir sont
portés par le tango chanté et sont exprimés dans
les chorégraphies torrides, presque violentes
des danseurs professionnels. Ce que donne à voir
le tango, c’est une représentation ritualisée de
l’attraction érotique qui ne dit pas le tout de
cette danse.
Limiter le tango à l’érotisme est aussi
réducteur que limiter la sexualité à l’érotisme
ou bien limiter la rencontre amoureuse à la
relation sexuelle. C’est une sorte
d’appauvrissement volontaire par aveuglement
devant
l’intensité érotique.
Il est facile de tomber dans le piège de
la drague en déduisant une disponibilité
sexuelle de la part des danseuses et des
danseurs habiles dans l’expression de la passion
amoureuse, erreur dans laquelle tombent certains
spectateurs.
Le tango est une danse de couple et une
danse de salon, pas une antichambre.
Remarquons
que l’on retrouve la même erreur interprétative
en éducation sexuelle quand les personnes - le
plus souvent des opposants à cette forme
d’éducation- imaginent que parler de sexualité
avec les jeunes les incite à avoir des
comportements sexuels précoces, alors que les
recherches scientifiques et la pratique
pédagogique prouvent abondamment le contraire
depuis des années. Certains opposants sont allés
jusqu’à prédire dans leur croisade des années 80
contre le programme d’éducation sexuelle à
l’école, que les professeures
auraient
des relations sexuelles devant les élèves et
leur montreraient comment se masturber. Le désir
exprimé par une parole ou illustré par une danse
peut alimenter bien des fantasmes.
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3.5 Une
éthique du tango
S’il
est impossible d’éluder l’aspect érotique du
tango, ce qui serait le dénaturer et lui ôter
son énergie vitale, il est cependant possible de
l’intégrer à la pratique sociale de la danse. De
la même façon l’éducation sexuelle ne vise pas à
éteindre le désir mais à l’intégrer dans une
relation humaine et un projet de vie. Dans les
deux cas, Éros est non seulement civilisé mais
civilisateur.
Pour
conserver toute son intensité et sa puissance
évocatrice au tango sans risquer de dérapage
sexuel, des moyens ont été mis en place
progressivement
pour encadrer cette danse. Ce sont de
véritables règles
transmises oralement
entre
danseurs, constituant une sorte de code du
tango.
(9). Tout d’abord, certaines règles
s’appliquent à la danse elle-même ; des normes
de décence vestimentaire et gestuelle s’y
appliquent comme dans toute autre activité
sociale. Ensuite le contact physique est limité
au haut du corps, à l’exclusion du bassin, les
jambes restant libres pour permettre les pas de
danse.
À la différence du slow, ni les
frottements, ni les baisers, ni les caresses ne
sont tolérés pendant la danse.
D’autres règles codifient l’invitation
dans le rituel du cabeceo* ou léger signe de la
tête de l’homme accompagné du regard en
direction de la danseuse choisie. La discrétion
de cette invitation permet à la danseuse de
refuser en faisant mine de l’ignorer ou
d’accepter par un léger signe de tête ou un
sourire. Si elle empêche une compétition sauvage
entre mâles dominants et leur évite la honte
d’un refus public, elle ne confère
malheureusement aucune initiative aux danseuses.
Cette partie du rituel est régulièrement mise en
brèche au Québec dans le contexte convivial des
practica ou des milongas* entre amis pendant
lesquels les danseuses se permettent d’inviter
leurs partenaires. D’autres éléments restent
constants tels la limite de temps d’une
invitation à une tenda* soit trois ou quatre
danses consécutives séparées par une musique
très différente de celle du tango. Cette règle
permet de ne pas monopoliser les partenaires ou
de se sauver la tête haute. Ou encore le sens de
la danse qui exige que tous suivent en dansant
le sens inverse des aiguilles d’une montre afin
d’éviter chutes et accrochages.
Ce que ce code exprime, c’est une
considération pour autrui et un sens de la
responsabilité collective.
Sans trop forcer la note, il est possible
de parler ici d’une sorte d’éthique du tango
visant à
domestiquer la puissance érotique de cette
danse.
Apprendre à danser ne se limite pas à
danser avec une personne mais à danser avec elle
dans un groupe de danseurs. C’est aussi un
apprentissage social qui permet
de s’intégrer à la communauté tango.
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4-
Apprendre à aller vers l’autre
Oser la
rencontre, prendre le risque du contact puis de
l’intimité, tels sont les objectifs de la vie
sexuelle et du tango. Dans les deux cas, il faut
apprendre à aller vers l’autre, à faire un
pas vers l’autre.
Le film
de Stéphane Brizé Je ne suis pas là pour être
aimé illustre de façon remarquable à quel
point ces deux apprentissages dont l’enjeu
ultime est la rencontre sont complémentaires
et indissociables.
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4.1 Le
tango comme métaphore de la rencontre
Le tango
se présente aussi
comme une métaphore de la rencontre
amoureuse, le plus souvent malheureuse. La
jalousie, l’abandon, l’infidélité et la solitude
sont des thèmes récurrents de la littérature du
tango et de sa musique. Ces formes d’art ont
permis à des immigrés, célibataires et
marginaux, d’exprimer leur difficile condition
dans les quartiers du port de Buenos Aires au
début du XXème siècle. L’aspect dramatique de la
rencontre amoureuse racontée dans le tango des
origines est en contradiction totale avec le
désir actuel de rencontre des danseurs !!
Les étapes de la rencontre sont néanmoins
révélatrices des enjeux de celle-ci. D’abord, il
y a la rencontre de deux danseurs ; l’accord
passe par l’harmonie de la danse ou par le
comique de situation généré par les pas
maladroits des danseurs débutants, s’ils sont
capables d’en rire ensemble.
Puis le couple passe à l’étape suivante
qui est celle de partenaires de danse; c’est un
couple occasionnel déterminé par sa fonction,
qui peut devenir un couple stable.
L’étape suivante est celle de la
rencontre de deux personnes qui, entre autres,
dansent ensemble le tango. À ce moment,
l’attraction érotique et la maitrise technique
sont intégrés à une relation interpersonnelle
plus large qui peut être amicale ou amoureuse.
Cette séquence n’est pas toujours
liée à une seule personne, bien que ce
souhait d’unité exclusive s’exprime souvent. Des
danseurs peuvent avoir des partenaires de danse
occasionnels ou réguliers; ils peuvent dissocier
leur activité de danseurs de leur vie de couple.
Quelque soit leur choix, ils vivent grâce
au tango certains types de rencontres qui les
nourrissent.
À chaque étape de cette rencontre, le
niveau de connaissance de soi et d’autrui
s’approfondit et l’intensité des sentiments suit
cette évolution. À chaque étape, une éthique de
la rencontre est essentielle pour respecter les
personnes en cause.
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4.2 La
rencontre de l’autre à l’adolescence
De la
même façon mais dans un autre registre,
l’apprentissage de l’adolescence est centré sur
la rencontre amicale et amoureuse; l’éducation
sexuelle aide à comprendre ce qui se vit ou ce
qui est désiré. Le défi des garçons comme des
filles est d’oser approcher individuellement
l’autre, en dehors du groupe de copains.
Intégrer ses pulsions sexuelles dans une
rencontre n’est pas une mince affaire quand
cette pulsion est à son niveau maximum comme
c’est le cas chez les garçons adolescents. Un
des défis de la rencontre est d’intégrer la
sexualité dans une relation interpersonnelle.
Devant la difficulté de l’entreprise, certains
adolescents vont répartir les rôles à
différentes personnes. Ils auront tout à la
fois, une « fuck friend » avec laquelle ils ne
partagent que leur vie sexuelle, une blonde qui
joue le rôle de maîtresse et d’amoureuse, une
amoureuse qu’ils aiment sans la toucher et
quelques amies ou copines. Certains hommes vont
continuent cette segmentation des relations
humaines et des comportements sexuels pendant
leur vie adulte. Or ce compartimentage des
fonctions n’est en aucune façon compatible avec
le désir d’union et parfois de fusion des
adolescentes, d’où d’inévitables tensions entre
jeunes et parfois aussi, entre adultes. Le défi
de rencontrer l’autre avec tout ce qu’il est
constitue un défi de nature éthique puisqu’il
amène à considérer l’ensemble de la personne et
non pas seulement son attraction érotique ou les
besoins érotiques et affectifs qu’il pourrait
combler. Le risque est toujours présent de
n’utiliser autrui que comme un moyen de se
satisfaire, de l’instrumentaliser en le
compartimentant dans un rôle précis.
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4.3
Quand l’autre n’est plus qu’un moyen
Ces
risques d’instrumentalisation d’autrui existent
également dans la rencontre de l’autre du tango;
ils sautent aux yeux de tout observateur
perspicace de la scène du bal.
Le
premier risque est le narcissisme des danseurs
qui se regardent danser et se complaisent dans
ce spectacle; des danseuses qui usent des
embellissements à temps et surtout à contre-
temps ;
« Regardez ce que je sais faire » ; des danseurs
qui se pavanent dans leur habileté de guideurs;
« Regardez
ce que je lui fais faire ». Leur danse et leurs
partenaires ne sont alors que des faire-valoir.
Le
deuxième risque qui est le corollaire du
premier, est l’exhibitionnisme. Les danseurs
montrent et démontrent leur habileté
individuelle sans considération de la personne
avec laquelle ils dansent. Ils prennent et
gardent l’attention sur eux en épatant la
galerie, ils oublient leur partenaire qui n’est
en plus un ou une. Parfois, ils en arrivent même
jusqu’à oublier
la musique !
Le
troisième risque est lié au choix exclusif du
meilleur partenaire, les autres danseurs étant
relégués aux oubliettes.
La belle danseuse-trophée, le danseur le
plus expérimenté sont choisis à l’exclusion de
toute autre personne. Il s’agit d’être admiré,
non de rencontrer une personne.
Le
dernier risque est moins évident car il demande
un œil avisé pour être repéré. Il s’agit de la
violence verbale, de la brusquerie ou de la
jalousie exprimés pendant la danse ou après
celle-ci. Certaines attitudes de propriétaires
relèvent de cette catégorie, de même que les
critiques acerbes et dévalorisantes adressées à
mi-voix aux partenaires.
Dans
tous les cas, nous avons affaire à des manques
de respect et à une négligence envers une
personne à qui n’est accordée que très peu de
place et encore moins de valeur.
La comparaison avec la vie sexuelle est
aisée; le narcissisme, l’exhibitionnisme, la
violence et le contrôle sont des formes
courantes d’utilisation sexuelle d’autrui. Dans
aucun de ces cas n’existe une véritable
rencontre parce qu’il n’existe pas de
considération d’autrui en dehors de son utilité.
Une des fonctions de l’éducation sexuelle est de
prendre conscience de ces comportements et de
les prévenir.
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4.4 Les
enjeux de la proximité
Sans
aller jusqu’aux comportements irrespectueux qui
viennent d’être mentionnés, il reste qu’aller
vers l’autre est une démarche psychologiquement
ardue. La
proximité amène un dévoilement de soi qui révèle
à autrui les forces et les faiblesses de chacun
et le rend d’autant vulnérable.
Dans le tango, le dévoilement physique
est limité par les usages et le code mais le
dévoilement psychologique n’est en rien protégé.
Les maladresses, les complexes, les traits de
caractère, les marquages culturels ou sociaux,
tout ce qui fait la personne est mis en jeu et
exposé quand elle danse en public. Elle doit
alors assumer le risque d’un certain dévoilement
majoré par le fait que le tango est aussi un
spectacle. Ce
qui est vu dans la danse, ce sont deux personnes
et un couple qui exprime la sensualité et
l’érotisme du tango en public. Pour protéger les
personnes et conserver la nature artistique de
la danse, l’intimité érotique n’y sera jamais
plus qu’évoquée.
La
démarche vers l’autre, les pas en avant,
peut viser une proximité allant jusqu'à
l’intimité sexuelle ainsi qu’un partage de
sentiments qui peut aller jusqu’à l’amour; le
tango est saturé de ce rêve de fusion.
Or l’intimité abolit les frontières entre
soi et autrui; elle peut faire perdre ses
repères, amener toutes les confusions et mener à
la fusion, comme c’est souvent le cas dans les
amours adolescentes. La grande proximité rend
les personnes vulnérables à la critique, aux
pressions, à la violence qui est présente dans
les relations amoureuses des jeunes, entre
autres. Aller vers l’autre est riche de
possibilités mais non sans risques.
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4.5 La
communication comme condition de la
rencontre
Pour
qu’une rencontre ait lieu, il est nécessaire
d’entrer en communication avec autrui ; c’est le
fruit d’un apprentissage autant en éducation
sexuelle que dans le tango, mais de façon
différente. Alors que l’éducation sexuelle passe
uniquement par le langage (discussions,
animations de groupe, études de cas, journal de
bord), le tango passe exclusivement par le
corps. La parole est exclue pendant la danse
bien qu’un temps soit réservé à la conversation
entre chaque danse d’une tenda*. C’est un bien
étonnant spectacle que celui de tous ces couples
arrêtés à discuter aimablement sur le plancher
de danse, avant de repartir danser. Le rituel du
tango ne permet pas de rompre cette pause qui a
pour but d’établir ou d’instaurer une
communication entre danseurs, tout comme la
suite de plusieurs danses qui est nécessaire
pour se connaitre. En dehors de ce moment
codifié, seule la musique et les corps parlent.
Ils communiquent de façon publique mais
quasiment invisible pour les spectateurs, d’où
l’impression de magie fusionnelle qui émane du
tango. Seuls des indices corporels de plus en
plus ténus à mesure que les danseurs maîtrisent
la danse leur permettent de communiquer. Le
danseur qui guide sa partenaire ne dispose que
d’une ouverture plus ou moins large du torse,
parfois d’un léger appui de la main droite dans
le dos de sa partenaire, d’une inclinaison de la
tête ou d’une direction du regard pour indiquer
à cette dernière le pas suivant. Le mouvement
qu’il impulse part de son torse, d’où
l’importance de tenir sa partenaire contre lui.
De son côté la danseuse ne peut se fier qu’à ces
indices pour bouger; elle observe, elle devine,
elle attend, elle écoute parfois les yeux fermés
pour mieux se concentrer sur le contact corporel
et dans le doute, elle pratique la suspension du
mouvement…. Les visages des danseurs sont
concentrés, parfois tendus; ils sont tout à leur
dialogue corporel dans la musique.
Cette
exigeante forme de communication
est
rendue nécessaire par la nature du tango qui
n’est pas, contrairement aux autres danses
sociales, une suite de mouvements répétitifs. Le
tango est une danse de création continue qu’il
faut élaborer au fur et à mesure de la danse.
Les danseurs ne disposent que de figures (ou
pas) que
le danseur qui agit comme guideur va choisir
d’utiliser selon son inspiration, sa partenaire,
la musique et l’espace disponible. Autrement
dit, sans une intense communication non verbale,
le tango n’existe pas.
La vie
sexuelle nécessite autant que le tango des
habiletés à communiquer verbalement et
corporellement. L’éducation sexuelle passe par
un apprentissage de la communication à propos de
la vie sexuelle et, par effet indirect souhaité,
avec les éventuels partenaires.
Elle prend exclusivement
la forme de discussions, sans aucun
apprentissage corporel direct, ne passant que
par le langage. Elle prépare à une rencontre
qui, elle, passera autant par le corps que par
le langage, avec évidemment, une importance
corporelle maximale dans la relation sexuelle.
Le but de l’éducation sexuelle, à la différence
de l’éducation érotique, vise à ce que les
relations sexuelles soient de véritables
relations humaines et non pas seulement des
performances sexuelles.
Dans les
deux cas de l’éducation sexuelle et du tango, la
connaissance de soi s’affine avec la
connaissance d’autrui; une forme de dialogue
s’instaure
dans lequel
chacun s’exprime et reconnait
ses limites, ses forces,
ses goûts et ceux de l’autre. Dans les
deux cas, la place est faite pour un
apprentissage de la tolérance et de l’empathie.
Dans le tango comme dans l’amour, l`empathie est
un filtre magique comme l’explique Richard David
Pretch : « L’image de soi reflétée par l’autre
est le plus grand élixir d’amour; et
l’affirmation de soi dans le plaisir et dans le
regard de l’autre, son arôme le plus convoité »
(10). L’amour, comme la danse, est un art ; les
deux peuvent s’apprendre.
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5-
Apprendre à danser en couple
Après la
prise de conscience de son identité sexuelle,
après l’acceptation des consonances érotiques du
tango et sa gestion du désir, après l’approche
de l’autre, il reste
encore … à danser avec lui.
Par commodité pédagogique ces éléments
ont été présentés comme des étapes successives
d’apprentissage sexuel et chorégraphique, ce
qu’ils sont le plus souvent effectivement. Mais
il se peut fort bien que ces étapes s’inversent
et que,
par exemple, le fait d’aller vers autrui
confirme une identité sexuelle vacillante. Ou
bien encore que le fait de danser permettre
d’apprivoiser le désir.
Il reste
qu’à la fin du compte, il s’agit de danser le
tango et de devenir davantage soi-même comme
homme ou comme femme.
Par
couple, entendons ici à la fois le couple
régulier partenaire de tango et parfois aussi
partenaire dans la vie et le couple occasionnel
des partenaires de danse privilégiés. La
difficulté de préciser cette notion vient de sa
parenté avec la vie sexuelle; la notion de
couple est connotée.
Ce n’est pas sans raison que l’on parle
de couple de danseurs ou de partenaires.
Ce n’est pas sans raison non plus que le
tango attire les foules au moment où les danses
de couples ont quasiment disparu de l’espace
social au profit des danses en ligne et des
danses individuelles. Avant de voir des
danseurs, les spectateurs du tango voient un
couple et ils chercheront toujours ce couple,
qu’il soit réel ou imaginaire, derrière les
danseurs.
Danser
en couple, c’est beaucoup plus que « faire
des pas ensemble » même si la maîtrise des
pas obsède parfois les débutants au point de
leur faire oublier l`intimité et le plaisir
partagés qu’ils recherchaient en venant danser
le tango.
D’un piètre chanteur, on dira qu’il a
fait toutes ses notes et non pas qu’il a chanté;
de même façon, on remarquera vite d’un piètre
danseur que s’il a fait des pas, il n’a pas
vraiment dansé. C’est que la danse de couple
n’est pas qu’une juxtaposition rythmée des pas
d’un danseur et d’une danseuse.
Danser en couple suppose une connaissance
et une affirmation de soi et d’autrui, une
communication et un respect mutuel, un partage
de l’espace et de la musique, un engagement
commun dans la réussite de la danse.
Les
danseurs
sont sensibles aux signes d’une véritable danse
; quand ils ne les ressentent pas, ils ont le
sentiment frustrant de ne pas vraiment avoir
dansé.
Ce sont des indices observables par les
spectateurs du tango. Le premier indice réside
dans la fluidité des mouvements du couple issue
de la compréhension du guidage et des
rétroactions qu’il suscite; pas d’hésitation
mais une légère suspension; pas de brutalité
mais de l’intensité ; pas de solo ou même deux
solos, mais un duo. Le second indice réside dans
l’intensité adéquate des mouvements des deux
danseurs, sans raideur mais sans mollesse non
plus. Le rythme commun est un troisième élément
qui fait bouger ensemble, suivre la musique « d’un même
pas », avec le même élan et conséquemment le
même arrêt, sans que l’un ne tire, ni que
l’autre ne soit à la traîne. Un indice
supplémentaire se trouve dans le commun désir de
danser qui est souvent inégalement partagé au
début de l’apprentissage du tango (« je danse
pour lui faire plaisir »). Il tend à
s’uniformiser en cours d’apprentissage jusqu’à
ce que la danse devienne un projet commun.
Finalement, le maître mot est bien celui le
plaisir; celui qui est manifestement partagé par
les danseurs quelque soit
leur niveau technique, leur condition
physique ou leur âge.
Le tango est un voyage à deux dans la
musique qui exige
une préparation
(un
apprentissage), une direction (un but commun),
des balises (un code de comportements et une
éthique de la rencontre).
Comment
ne pas voir que les critères qui viennent d’être
présentés pourraient être repris mot à mot pour
qualifier une relation sexuelle réussie et une
vie sexuelle heureuse ?
le tango ne se résume pas plus à des
pas de danse que la sexualité ne se réduit
aux relations sexuelles ou les relations
sexuelles à des techniques érotiques.
L’éducation sexuelle et le tango ont donc
plusieurs points communs. Ils permettent
de se connaitre, de s’affirmer comme
individus sexués,
d’apprendre à aller vers l’autre, de se
réaliser comme danseurs et comme personnes.
Au-delà des normes sociales nécessaires à la
vie sexuelle et des codes nécessaires à la
pratique de la danse, ils
partagent les mêmes enjeux éthiques relatifs à
la rencontre.
Le
premier enjeu est celui de l’intimité, de la
proximité désirée qui rend heureux mais
vulnérable, de son expression publique qui
dévoile un peu de soi et du couple avec la
valorisation mais aussi toutes les atteintes à
l’estime de soi qui peuvent en résulter.
Le
deuxième enjeu est
celui de la liberté; liberté de parole dans
l’éducation sexuelle, liberté d’action dans le
tango qui permet l’invitation et son refus ainsi
qu’une marge de manœuvre pour chacun dans
l’espace partagé avec le groupe de danseurs.
Le
troisième enjeu est celui de l’intensité mais
non de la brutalité; intensité du désir à
apprivoiser et de la passion à exprimer. Cette
intensité passionnée rend difficile la stabilité
des partenaires dans le tango comme dans la vie.
Le
quatrième enjeu est celui de la responsabilité ;
responsabilité de chacun dans l’apprentissage,
dans la réussite de la discussion ou de la
danse, dans le plaisir partagé.
Le
sixième enjeu est celui de l’égalité et c’est
celui qui pose actuellement le plus de problème
dans la pratique du tango. La culture machiste
qui est à l’origine du tango exige une
répartition des rôles qui est anachroniquement
inégalitaire. L’homme y est guideur,
actif, inviteur; la femme y est guidée,
obéissante, invitée. Il
faudra
beaucoup de temps et de travail à cette dernière
pour arriver à une maîtrise de la danse qui lui
permette une petite marge de liberté propice à
l’improvisation. Certes le nouveau tango accorde
une place plus importante à la danseuse mais
seuls les bals gays permettent actuellement une
permutation libre des rôles entre partenaires du
même sexe.
Ces
enjeux éthiques sont
finalement similaires à ceux qui se
trouvent
dans toute rencontre et dans toute
relation interpersonnelle. Ils sont seulement
plus évidents parce que l’éducation sexuelle et
le tango sont des activités collectives et que
l’une d’elle (le tango) est une activité
publique doublée d’un spectacle.
Et ils sont plus nécessaires qu’ailleurs
parce que la sexualité et le désir sont au coeur
de ces deux activités; ce sont des forces qui
illuminent et réchauffent mais qui peuvent aussi
embraser et détruire.
L’énergie sexuelle est reconnue,
acceptée, intégrée, transformée en vue d’une
rencontre dans l’éducation sexuelle et dans le
tango. Elle est encadrée par des normes de
discussion et des codes de conduites qui
protègent les personnes et permettent la vie
sociale (11). Malgré
ces précautions, il
reste toujours la possibilité de
l’utilisation d’autrui ou de la fuite dans le
plaisir narcissique. Alors, ce qui est vécu
dans
l’éducation sexuelle n’est plus une discussion
mais un monologue et ce qui est vécu dans le
tango n’est plus ni une rencontre, ni une danse.
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Références
(1)
Desaulniers Marie-Paule, L’éducation
sexuelle; Définition, Édition Agence d'ARC,
Montréal, 1990.
(2)
Ricoeur Paul, Avant la loi morale, l'éthique,
Paris,
Encyclopedia Universalis, symposium : les
enjeux, p. 42-45, 1988.
(3)
Marzano Michela, « Libération sexuelle,
consentement et consommation: l’éthique face aux
évolutions des mœurs »
dans L’éthique appliquée, Paris;
Presses Universitaires de France, p. 90-107,
2008.
(4)
Desaulniers Marie-Paule, « Un exemple de débat
actuel sur les valeurs: l'éducation sexuelle à
l'école », Revue Éducation Canada,
Ottawa, Canada, mai 1982, vol. 22, no 2, p.
34-39.
(5)
Aprill Christophe, « La construction de soi »,
dans Tango, Le couple, le bal et la
scène, Paris; Autrement,
p. 82.
2008.
(6)
Ministère de l'Éducation du Québec,
Programme d'études, Secondaire,
Formation personnelle et sociale, volet
Éducation à la sexualité, Québec;
Direction générale de développement pédagogique,
p.128,
1984.
(7)
Casta-Rosez Fabienne, Histoire du flit, Les
jeux de l’innocence et de la perversité,
Paris ; Grasset, 2000.
(8)
Duquet Françine, avec la collaboration d’Anne
Quiniart, Perceptions et pratiques des jeunes
du secondaire face à l’hypersexualité et à la
sexualisation précoce, Rapport de recherche,
Montréal; YWCA,Y des femmes, Montréal/ UQAM,
Services à la collectivité/ Forum des jeunes de
l’île de Montréal, 2009.
(9)
Maigret Frédéric, « Asi se baila; code des
milongas et
droit du quotidien » dans
Tango, corps à corps culturel, Danser en tandem
pour mieux vivre, France Joyal
(dir), Québec; Presses de l’Université du
Québec, p.39-76, 2009.
(10)
Pretcht, Richard David, Amour, déconstruction
d’un sentiment, Paris; Belfond,
p.220-221, 2011.
(11)
Fourez, Georges, Au-delà des interdits; d’une
morale de la rencontre à une morale sociale,
Paris; Duculot, 1972.
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Vocabulaire du tango
Abrazo :
étreinte plus ou moins rapprochée
cabacceo : invitation du danseur par un léger
mouvement de tête accompagné du regard et
réponse de la danseuse.
gancho :
crochet effectué entre les jambes du partenaire
milonga : soirée de
tango.
occho :
pivot ou pas
en huit
Pratica : soirée de
tango consacrée à
la répétition
des pas appris en cours.
Tenda :
suite de 3 ou 4 danses séparée par quelques
minutes d’immobilité sur la piste et terminée
par une musique qui n’appartient pas au tango
(jazz, classique).
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